• La veille de l’épidémie.
« Les filles, j’suis rentré ! » annonce un homme rentrant par la porte d’entrée de la demeure. Cet homme, c’est Thomas Kelly. Marshall des Etats-Unis d’Amérique, il rentre d’une assignation de plusieurs jours durant laquelle il a poursuivi un détraqué serial killer multi-récidiviste pour finalement le mettre derrière les barreaux. Cette affaire est passée aux informations chaque jour et on l’a vu se faire interviewer de temps à autre pour donner des détails sur le déroulement de l’enquête. On a rarement vu un homme aussi heureux de rentrer chez lui. Sa femme Suzan vient l’accueillir à bras ouverts pour le serrer fort contre lui, ils s’embrassent tendrement comme un couple aimant le ferait après plusieurs jours sans s’être vus. Puis c’est sa fille Maï qui vient à son tour se jeter dans ses bras pour un « câlin tout chaud » comme l’appelle, avec son papa ours préféré. Tom se sent bien dans ce cadre de vie, s’il le pouvait, il ne partirait plus en mission et resterait là à couler des jours heureux sans plus se soucier du monde extérieur. Mais comme le lui dit sa superbe femme : les gens ont aussi besoin de toi, tout comme nous avons besoin de toi à chacun de tes retours. Il combat le crime, il a toujours voulu nettoyer les rues du crime et de l’infamie et aujourd’hui il est arrivé à un niveau qui lui permet de faire exactement cela, mais à grande échelle.
Le repas est servi, la petite famille s’installe autour de la table. Maï raconte ses jours passés à l’école et elle rend son père fier. Il l’a regarde avec de grands yeux pétillants, et lorsqu’elle sourit il ne peut s’empêcher d’en faire autant. Ces femmes sont toute sa vie, il ne peut imaginer ce que serait son existence sans elles.
Les informations diffusent cette nouvelle en boucle : Panique dans le sud des Etats-Unis ! Cas de cannibalismes répertoriés ! Meurtres à grande échelle ! L’armée mobilisée pour endiguer cette vague de folie qui frappe les états voisins. Le bandeau d’urgence défile sans cesse sur le téléviseur alors que notre agent gouvernemental prend ses précautions en verrouillant les portes et les accès à la maison. Il jette un œil par les stores pour voir la situation dehors : tout semble normal. * Sans doute un cas isolé… * pense-t-il plus pour se rassurer qu’autre chose. Il envoie la petite au lit et il fait de même accompagné par sa douce moitié. Ils passèrent une nuit romantique d’étreintes charnelles et torrides. Qui aurait cru que cette nuit serait leur dernière ensemble… ?
• Le jour de l’épidémie.
Au petit matin, Tom se lève mais Suzan a déjà quitté le lit. Il la cherche du regard mais elle semble être en bas comme le laisse penser l’odeur de pancakes qui vient chatouiller ses narines. Il enfile un pantalon et descend les escaliers d’un pas léger comme pour surprendre la maisonnée. Maï est déjà habillée et joue à l’extérieur dans le jardin avec la petite voisine. Sue est aux fourneaux en train de terminer le petit déjeuner pour son mari. Celui-ci l’enserre de ses grands bras par derrière en venant coller son corps au sien comme pour puiser de sa chaleur humaine. Elle sourit puis l’embrasse amoureusement.
Une fois l’étreinte brisée, il va à la fenêtre pour apprécier la vue de sa fille qui s’amuse avec son amie… Mais… « Maï ? Maï… » Le père de famille se rue vers le porte qui mène à l’extérieur et toujours vêtu de son simple pantalon de pyjamas, il fonce soutenir sa fille qui semble en peine et qui se tient la main avec de grands signes de souffrance. Elle vient de se faire mordre sans savoir pourquoi par Ophélie la petite voisine. Mais à mieux y regarder, Tom s’aperçoit que la maison de la demoiselle est grande ouverte, que la fenêtre principale du salon est brisée… Quant à l’enfant elle-même… Elle a le teint blafard, d’immenses cernes et… il lui manque un morceau de joue ! Horrifié par cette vision, Tom attrape dans ses bras sa fille et fonce se réfugier chez lui. Il enferme la jeune fille dehors et pose sa fille sur le canapé en criant à Suzan de venir lui prodiguer les premiers soins pendant qu’il se prépare et qu’il va chercher son arme.
À l’étage, notre ami allume la TV mais rien ne s’affiche… Il n’y a qu’une neige perpétuelle sur tous les canaux. Comment cela a-t-il pu se produire en une seule nuit… ? « Merde… » marmonne-t-il pour lui-même. Et cela lui fait tilt juste à cet instant : les cas de paniques et d’hystérie dont ils ont parlé hier soir, le cannibalisme… Maï et sa main… Et si… Et si elle est infectée elle aussi à présent !? « Tom… ? AAAAAAAHHHH !!! » C’est sa femme ! Ni une ni deux, il fonce au rez-de-chaussée et là… vision cauchemardesque… Maï… Sa douce et si charmante fille a du sang qui lui coule de la bouche, un morceau de chair qui lui pend entre les dents. Quant à Suzan elle se tient le cou d’où gicle à grandes coulées son précieux liquide vital. Si on ne fait rien, elle mourra dans les secondes à venir. Alors avant même qu’il ne puisse faire quoi que ce soit, la petit Maï saute de nouveau sur sa génitrice pour planter de nouveau ses petites dents dans le bras de celle-ci cette fois. Le temps ralenti autour de notre héros, il a l’impression de s’être transposé dans un film de seconde zone où l’apocalypse était en train de s’abattre sur eux.
Thomas se reprend enfin, il se jette sur sa fille et l’attrape aussi délicatement que possible, mais le petit monstre se débat dans ses bras ce qui le force à raffermir sa prise pour l’extirper et l’empêcher de faire plus de mal à sa précieuse femme. Tout le long du processus, il n’a de cesse de rassurer ses deux belles en leur assurant qu’il prendrait soin d’elles et qu’il allait les sauver. Mais ses interlocutrices ne sont plus en état de répondre. Sue a perdu connaissance et Maï ne semble plus vraiment comprendre ce qui se passe. Dans les bras de son père elle griffe et essaie de mordre ces mains qui l’empêchent de rejoindre son déjeuner. Forçant plus que de raison il se rend compte qu’il est en train de faire du mal à sa progéniture alors il la relâche en s’excusant. Mais elle lui fait face à présent toutes dents dehors. Armé de son colt, Tom dégaine et pointe l’arme vers le front de son enfant. « Maï reprends toi chérie… Maï… Ne me fais pas faire ça… Ne m’obliges pas tirer… Maï… » Dit-il implorant son enfant de retrouver ses esprits. De chaudes larmes coulent le long de ses joues imberbes. Rien n’y fait, elle continue d’avancer inlassablement… « Non… Oh non… Je… Je t’aime ma chérie… » finit-il par dire quand soudain… PAN ! La balle sort du canon et vient répandre la cervelle de la petite sur le mur du fond du salon. Le petit corps de la brunette s’effondre en arrière avec un mouvement de recule suite à l’impact. Suzan ne respire plus non plus… Tom se tient là… Seul… Immobile…
• Il y a quelques mois :
Alors que Tom erre dans les rues d’Atlanta il entend une horde non loin qui grouille et qui râle. Ces bruits sont généralement signe pour lui de soucis et d’emmerdement alors il a pour habitude de se faire tout petit, silencieux et de prendre la tangente. Et pourtant, aujourd’hui il en a décidé autrement. Il vérifie ses munitions, il check le harnais de sa machette dans son dos et il décide de s’approcher des gémissements distinctifs des rôdeurs. N’importe qui le prendrait pour un fou ! Et pourtant il y va. Il va défier la mort en face, il va sans doute mal finir, mais aujourd’hui Tom sent que c’est un bon jour pour y passer.
Mais bien sûr, rien ne se passe jamais comme on l’a prévu de nos jours. S’il devait être le seul à crever, il aurait tenté le coup, mais en s’approchant de la horde il voit ce qui pousse ses zombies à s’acharner sur la porte de cette épicerie : une jeune femme s’est retranchée là-dedans. Un flingue à la main, elle pointe le premier mort qui finira par passer la vitre branlante de la devanture. * Avec un simple petit béretta, elle ne compte quand même pas s’en sortir ? * pense-t-il. Mais soudainement comme frappé par la foudre, il se rend compte de l’étrange ressemblance avec sa femme que porte la demoiselle sur son visage. Alors n’écoutant que son courage et se sentant pousser des ailes, Tom sort de derrière la voiture qui lui servait de cachette jusque-là et il empoigne sa m4 pour massacrer du rôdeur.
Ils finissent par s’en sortir tant bien que mal, ils s’enfuient ensemble sans dire un mot, mais bien conscient qu’ils allaient avoir besoin l’un de l’autre s’ils souhaitent survivre encore quelques temps dans ces terres désolées. « Je m’appelle Eden. » Thomas reste muet, la bouche entre-ouverte hébété par la flagrance de cette ressemblance. Puis une larme coule le long de sa joue. Il le sait. Il le sent. Cette femme peut lui redonner le goût de vivre.
• De nos jours :
« Bien, Fred et George vous prenez le Nord alors que je sors avec Eden vers l’Est. Vous ne vous quittez pas de vue et vous ne vous séparez sous aucun prétexte. Rappelez-vous ce que je vous ai appris : l’unité fait notre force. » Il jette un coup d’œil à sa ‘’fille’’ qui se tient prête juste derrière lui. À son signal, ils ouvrent les portes de l’église et fonce se mettre à l’abris derrière de vieille carcasses de voitures. Leur mission : ramener des survivants perdus dans un vieux bâtiment à l’Est quant aux autres, trouver des vivres et des munitions.
Voilà de quoi est fait leur quotidien depuis quelques semaines que le binôme s’est installé dans cette petite ville. Enfin, ils se sont retranchés dans l’église sans véritable autre choix puisqu’ils étaient repoussés par une horde trop importante pour leurs facultés. Bref, aujourd’hui ils tiennent à la vie et se soutiennent mutuellement sans jamais se quitter.